L’art ivoirien, depuis quelques années, a le vent en poupe. Si la qualité du travail des artistes locaux est l’une des raisons de cet essor, certaines personnalités, souvent dans l’ombre, impactent de façon significative le secteur. Galeristes, collectionneurs, communicateurs, mécènes… ils ont choisi de soutenir l’industrie de l’Art en Côte d’Ivoire. Coup de projecteurs sur six d’entre eux.
Par Marc Ergy
Yacouba Konaté
Membre de l’Académie des Arts, des Sciences et des Cultures d’Afrique et des Diasporas d’Abidjan (ASCAD), Le professeur de philosophie Yacouba Konaté est aussi le commissaire général du Marché des Arts du Spectacle Africain (MASA), l’un des plus grands festivals culturels en Afrique. Conservateur de musée, critique d’art renommé, collectionneur invétéré, il a contribué à mettre plusieurs artistes en lumière. Il est le directeur de la Rotonde des Arts contemporains, une Galerie incontournable à Abidjan, située dans la commune du Plateau, centre des affaires.
Yacouba Konaté est un amoureux et intellectuel de l’Art qui reçoit entre les quatre murs de sa galerie des échanges sur des thèmes liés à l’Art, des rencontres littéraires, des spectacles de slam, des représentations théâtrales, des concerts jazz, en dehors des expositions régulières de sculptures, de photographies, et de peintures.
Son parcours est impressionnant : En 1998, il est professeur Fulbright à l’université Stanford, entre 2004 et 2008 il enseigne à l’École des hautes études en sciences sociales en France. En 2000, il est directeur de l’Institut National des Arts et Cultures ainsi que directeur de cabinet des ministres de la culture et de la Francophonie. Il a également été l’un des conservateurs des expositions individuelles de la sixième Biennale de Dakar
L’homme fait figure de pilier et de sentinelle inspirant le respect pour son ouvrage.
Simone Guirandou
Personnalité reconnue du monde des arts en Côte d’Ivoire et bien au-delà de ses frontières, Simone Guirandou-N’Diaye est Membre de l’Académie des sciences, des arts, des cultures d’Afrique et des diasporas africaines (ASCAD), et de l’Association Internationale des Critiques d’Art.
Après trente années d’activités au sein de la Galerie Arts Pluriels, devenue au fil des années LE carrefour inévitable pour les artistes plasticiens, les artisans d’art et les amateurs d’art des cinq continents à Abidjan, Simone Guirandou offre un nouvel écrin à la promotion culturelle et artistique avec LouiSimone Guirandou Gallery. Ce temple de l’art continue, sous l’impulsion de sa célèbre fondatrice, de connecter l’art avec un public local pas toujours réceptif. «Bien souvent l’on s’interroge sur les sources d’une vocation. Il se peut qu’un désir secret réside en nous depuis longtemps. Mais le hasard déclenche parfois un déclic qui détermine la conduite de toute une vie.»
Toute une vie donc au service de l’art, qu’elle continue de promouvoir avec succès et qui fait d’elle une des promotrices les plus importantes du continent.
Thierry Dia
Un jour Thierry achète une œuvre à Sococé, hypermarché situé à Abidjan. Il découvre ainsi un jeune artiste qui lui dit qu’il veut arrêter de peindre à cause de ses problèmes d’argent. «Non ! Si j’ai acheté ton œuvre c’est justement parce qu’elle a de la valeur et parce que c’est beau !». Thierry lui demanda alors de produire des œuvres et pris l’engagement de l’aider à les vendre. C’est ainsi que commença l’aventure artistique pour ce communicateur de formation. En compagnie de quelques amis journalistes culturels, il transforme son domicile sis à Angré-Djibi, en galerie d’art de circonstance. Chaque week-end, le groupe s’y retrouve pour apprécier les œuvres des jeunes cooptés par Thierry Dia. En 2001, il crée l’agence Houkami Guyzagn qui est à la fois une galerie et une structure de promotion des arts plastiques.
Ses cibles, des jeunes artistes pour une clientèle composée essentiellement de jeunes cadres ivoiriens ou africains exerçant à Abidjan. Plus de 16 ans maintenant qu’il promeut des artistes. Aujourd’hui, même s’il ne s’en vante pas, Thierry a réussi à faire accepter les œuvres des jeunes artistes dont il a la gestion, à des collectionneurs et amateurs d’art de renoms en Côte d’Ivoire: Simplice De Messé Zinsou, Martine Coffi Studer, Adama Toungara, Nahim Suti, Hamed Bakayoko, Pr. Yacouba Konaté…pour ne citer que ceux-là. Ce pèlerin de l’art continue donc son bonhomme de chemin tout en continuant à s’imposer comme un des promoteurs de l’art avec lequel il faut indubitablement compter.
Cécile Fakhoury
Fille de galeristes parisiens, Cécile Fakhoury a grandi dans un quotidien baigné d’art. La jeune femme compte à son CV des stages dans des galeries ou des salles des ventes, notamment chez David Zwirner, à New York, Chantal Crousel ou Sotheby’s à Paris. Mais c’est à Abidjan, où elle venait régulièrement depuis dix ans, que la trentenaire, belle-fille de l’architecte ivoiro-libanais Pierre Fakhoury, a choisi de se poser et d’ouvrir sa propre galerie : 600 m2 répartis en deux espaces (intérieur et extérieur) zen et épurés, entièrement consacrés à la création contemporaine. Depuis, Cécile enchaîne les expositions dans ce temple de l’art compemporain.
La galerie a réussi à s’imposer en peu de temps comme une des plus vivantes de la capitale ivoirienne. Cécile s’est donné pour mission de promouvoir des talents déjà reconnus localement pour leur donner une dimension internationale, mais aussi de découvrir et donner de la notoriété à de jeunes artistes en les aidant à travailler et à réaliser de bonnes expositions. Une mission qu’elle rélève avec brio au fil des années et qui fait d’elle une des promotrices d’art incontournable des bords de la lagune ébrié.
Eline Arnaud
Entreprenante, avenante, engagée… autant de qualificatifs qui définissent Eline Arnaud : une Abidjanaise sans qui la scène montante de l’art contemporain et de l’artisanat à Abidjan ne serait pas la même.
Eline a initié Cité des arts, un concept emmené par l’association participative A’Lean & Friends, qu’elle conduit avec enthousiasme.
L’initiative vise à promouvoir la nouvelle génération d’artistes du continent, mais aussi à développer un système de mécénat encore peu exploité en Côte d’Ivoire. La jeune femme a définitivement à cœur d’encourager la production mais surtout la consommation locale. « On pousse des artistes qui ont du talent, qui sont vendables. L’idée étant de les amener à rencontrer les acteurs clefs qui peuvent les aider à promouvoir leur travail, s’exporter et tirer un réel profit financier de leur grande créativité afin de leur donner les outils et la première expérience nécessaires à leur évolution sur le marché des arts.». Eline continuera donc à stimuler les artistes locaux en début de carrière, afin de leur donner les outils et le début d’expérience nécessaires à l’évolution de leurs carrières.