« je pense que Je n’ai pas de ressources particulières… juste une bonne dose d’échecs et de persévérance et la formule est toute faite. »
Turay Mederic. A Abidjan, on penserait naïvement musique en entendant ce nom. Mederic s’est en effet fait connaître au public avec sa carrière pour le RNB et la danse. Mais l’homme a plus que ça à offrir.  Il faut simplement découvrir ses peintures aux figures géométriques pleines de relief et de couleurs et son carnet de voyage pour s’en rendre compte. Turay Mederic est aussi un artiste plasticien confirmé. Abidjan, Paris, Londres, Dakar, Tanger, Barcelone… Il expose dans le monde.
Déjà à l’âge de quatre ans, alors qu’il est plongé au cœur des influences artistiques et musicales des Etats- Unis où il passe son enfance, il commence à dessiner  des bandes dessinées et à imiter  des peintres célèbres tels que Pablo Picasso, Basquiat ou Salvadore Dali. Fort heureusement, de retour dans son pays natal la Côte d’Ivoire en 1995, il débute des études d’arts plastiques. Cinq ans plus tard, il est diplômé du centre technique des arts appliqués et de l’école d’art professionnel INSAAC. De sa première consécration à l’âge de vingt ans, en tant que meilleur jeune plasticien de l’Afrique de l’Ouest à aujourd’hui, l’artiste compte à son actif pas moins de cent-soixante-sept œuvres, quatorze distinctions,  une vingtaine d’expositions collectives et solos et une bonne dizaine de vente aux enchères.
L’artiste démontre sa maturité en transcendant les barrières disciplinaires pour imposer son style : la sculpeinture, un assemblage de sculpture et de peinture qui allie matériaux traditionnels (tels que le bois, les cauris, les toiles superposés) et techniques modernes (le mixed média à l’aide de peinture acrylique). Le langage qui se veut  métaphorique et universel,  parle de l’Afrique et du monde au travers de signes polysémiques, de symboles, d’allusions ;  explore d’autres endroits et raconte d’autres histoires dans l’histoire, pour créer la ‘’Trace’’ de l’humanité.
Focus sur le futur ‘’Basquiat’’ de l’art africain :
 
« je pense que Je n’ai pas de ressources particulières… juste une bonne dose d’échecs et de persévérance et la formule est toute faite. »
Racontez-nous un peu comment vous avez vécu votre toute première exposition.
Houlaa… ma toute première exposition collective, si je ne me trompe pas, était à Abidjan lors de mon prix remise  par la Fondation «  Panafcom », à l’époque société de communication. J’avais ce sentiment d’accomplissement et de fierté en voyant ce public regarder et admirer mon travail. Il faut dire aussi que j’étais en fin de cycle aux beaux-arts et j’avais un peu peur des critiques des professionnels du milieu sur mon travail, mais le prix m’a donnée encore plus d’assurance et de confiance.
 
Qu’est-ce qui vous a autant marqué chez les peintres Basquiat, Dali et Picasso au point d’influencer votre art ?
Déjà dans mon enfance, j’ai eu cette chance d’être en contact avec ces influences : Basquiat, Picasso, Salvador  Dali  ou même  Matisse  aux Etats-Unis  où l’art est célébré en permanence. Selon moi, Ces Artistes ont révolutionné ce qu’on pourrait appeler l’art  «  Classique ». Pour moi,  L’art moderne transporte dans l’imaginaire et construit un pont entre notre propre vision et la réalité.
 
     Quel est le but recherché avec ‘’Trace’’ qui est votre signature artistique ? Pensez-vous l’avoir atteint ?
Je suis en perpétuel développement de mon Art  et je crois que chez  un peintre on n’a jamais atteint son but à mon humble avis. Comme je le disais tantôt, « Traces » pour moi est la fusion entre l’Art occidental et Africain, une nouvelle façon de voir le «  Street Art » avec un public plus large et varié.
 
la pomme rouge, les mots barrés, la bouche de certains personnages barrée par une croix…
     Arrêtons-nous un instant sur quelques signes qui reviennent toujours dans vos œuvres: la pomme rouge, les mots barrés, la bouche de certains personnages barrée par une croix. Quelles sont la signification et l’importance de ces détails ? 
Ces signes sont très souvent dans mes œuvres en effet. Je peux vous dire déjà que la pomme a pour moi une connotation religieuse. Elle est très souvent représentée comme élément déclencheur du pécher dans nos religions. Pour mes personnages à grande bouche et dessinés parfois   en forme de masque, c’est ma façon de présenter les être humains  tels que je les vois : Méchants, joyeux, égoïstes, pleins de bonté parfois malicieux etc… J’ajoute des mots et des poèmes que je trouve instantanément lors de mon travail. Ils ne sont pas très souvent réfléchis ; je guide mon inspiration  sur des sentiers inconnus qui mènent parfois le public à la réflexion. J’aime beaucoup interroger le public sur mon travail. Quand je barre certains mots ou phrases, cela permet au public d’encore plus prêter attention à certains messages codés parfois.
 
   Certaines personnes vous classent dans la catégorie des graphistes. Qu’avez-vous à dire à ce sujet ?
Graphiste ? Bah je pense que le graphisme de nos jours est tout  un  Art ! je peux l’accepter mais pour moi je suis plutôt dans un courant néo expressionniste avec une fusion du street Art.
 
   De façon générale, vous avez l’impression que votre public retient  plus l’aspect esthétique de vos œuvres ou les messages qu’ils véhiculent ?
Au départ c’était plutôt l’aspect esthétique mais depuis quelques années, pour ceux qui me suivent, (mon public en général et les collectionneurs de mon travail) c’est un peu les deux.
 
    quelles sont les ressources et les atouts qui vous ont permis de vous réaliser au plan artistique ?
Bah je pense que Je n’ai  pas de ressources particulières… juste une bonne dose d’échecs et  de persévérance et la formule est toute faite.
« Chez tous les Artistes, nous avons cette période sombre où plane le doute. »
 
  Tout au long de votre parcours artistique, y’a-t-il eu de grands  moments de doute lors desquels vous étiez tenté de tout arrêter et de prendre un autre chemin ?
Chez tous les Artistes, nous avons cette période sombre où plane le doute. Mais heureusement qu’il y a toujours des gens qu’on  croise qui croient en ce que nous faisons et nous aident à surmonter certaines épreuves tôt ou tard.
 
Que pensez-vous de l’évolution de l’art en Afrique de façon générale et en côte d’ivoire en particulier ?
Je suis très fier ! Nous voyons  de plus en plus de galléries et d’institutions d’Art qui voient le jour, une nouvelle génération d’artistes plus ambitieux commence à entrer dans le grand marcher de l’Art international ; et ça c’est un grand pas pour nos Artistes qui quelques années  en arrière  était pratiquement inexistant ou sectaire.
 
  Pensez-vous que l’art peut permettre de résoudre les problèmes socio-économiques de la côte d’Ivoire ? si oui comment ?
Bien sûr ! Plusieurs Artistes y ont contribué et continuent de le faire ! Nos messages et signes préviennent de beaucoup de dangers qui guettent notre société. C’est un perpétuel combat !
 Merci pour votre disponibilité et votre collaboration, longue vie à votre talent et à vos œuvres.
Merci infiniment pour cette entretien et merci de faire connaitre et aimer l’art encore plus au public.
 
Fatim DIABY.

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